Voici une information au sujet d'un maire qui souhaite proposer à ses administrés de payer plus d'impôts. Pour ceux qui le souhaitent...
Pour financer des projets innovants, le maire de Terville (Moselle) propose de créer un impôt "volontaire". Concrètement, l'impôt des contribuables qui le veulent serait augmenté de 10%. Impossible à mettre en œuvre sans une modification de la loi, le concept pourrait selon l'élu contribuer à améliorer la relation des Français à la fiscalité.
Patrick Luxembourger, maire de Terville, cité mosellane de 6.600 âmes, ne craint pas de sortir des sentiers battus. Lors du dernier débat d'orientation budgétaire de sa commune, il a proposé la création d'un "impôt volontaire". Seuls les contribuables de la commune qui le veulent paieraient 10% d'impôt en plus, en sachant qu'ils connaîtraient à l'avance la nature des projets qui bénéficieraient de leur générosité.
L'élu reconnaît que la modalité serait contraire au principe de non-affectation des impôts, l'un des piliers du droit budgétaire. Pourtant, il voit des avantages à faire ainsi : l'adhésion des citoyens aux contributions directes locales en sortirait accrue. Ce qui serait une avancée très positive si l'on en croit l'élu, pour qui le rapport dégradé entre les Français et leurs impôts est un mal profond. Malheureusement dans cette affaire, l'administration fiscale aurait une part de responsabilité par son "goût pour la coercition et le bâton fiscal", explique celui qui est aussi avocat d'affaires au barreau de Luxembourg.
Démocratie participative
Dans le même objectif, il imagine la mise en place d'un "bonus-malus". Le contribuable satisfait de l'action de sa commune aurait la possibilité de payer 10% d'impôt en plus, tandis que celui qui est mécontent pourrait réduire sa contribution de 10%, "sans même devoir se justifier". Bien sûr, "on assisterait à des moments de défoulement", concède Patrick Luxembourger. "Mais, poursuit-il, on aboutirait aussi à une plus grande responsabilisation des citoyens", ce qui serait bénéfique à la relation, aujourd'hui tumultueuse, que ceux-ci entretiennent avec leurs élus.
Pourquoi le premier magistrat de Terville n'a-t-il pas proposé tout simplement de recourir au financement participatif, ou "crowdfunding", solution que les collectivités peuvent utiliser très aisément depuis un décret du 14 décembre 2015 ? Non par ignorance de cette modalité déjà en vogue, mais parce qu'il existe, selon lui, une différence significative entre celle-ci et l'impôt volontaire. Il explique : "Dans un cas, vous donnez pour obtenir quelque chose en retour, tandis que dans l'autre vous acceptez de contribuer à une dépense qui ne va pas forcément vous être profitable, alors qu'elle va peut-être bénéficier à votre voisin qui, lui, n'aura pas payé. Dans ce dernier cas - l'impôt volontaire - vous restez vraiment dans une logique de financement de la vie collective."
Pour autant, mieux vaudrait, selon l'édile, affecter les recettes de cet impôt à des projets qui "touchent les sentiments des gens". Pour Terville, c'est le développement de l'apprentissage de la musique au profit du plus grand nombre, dans la continuité d'une politique déjà très active en faveur de l'activité musicale, qui a par exemple la préférence de Patrick Luxembourger. Plus largement, par le nouvel impôt, il s'agirait de favoriser la réalisation de projets innovants. Et ce, en associant les citoyens (pas seulement ceux qui ont accepté de verser 10% d'impôts en plus) à leur mise en œuvre.
Appel aux dons
Cependant, tout cela reste encore très théorique sans une loi permettant au moins l'expérimentation de l'impôt volontaire. Or, un tel projet n'est vraiment pas à l'ordre du jour des pouvoirs publics nationaux. Dommage, estime le maire de Terville. "La problématique des finances publiques ne trouvera pas une solution uniquement à travers une réflexion sur plus ou moins d'impôts", souligne-t-il.
Mais le fait que l'idée de Patrick Luxembourger s'applique un jour, n'est pas totalement illusoire - ce qui est inconcevable à un moment donné finit parfois par devenir possible. L'élu devrait le savoir au vu de son expérience personnelle. En 2001, il prenait les rênes de la ville la plus endettée de France au prorata de la population et engageait des actions en justice contre la Caisse d'épargne, qu'il considérait comme responsable de la situation. Près de quinze ans plus tard, le résultat est là. Malgré un procès perdu en 2010, il a fait la paix avec la banque, en signant un protocole d'accord pour le financement du projet urbain et de la politique en faveur de la musique à Terville.
En tout cas, à défaut de créer dès à présent un nouvel impôt, le maire de Terville peut lancer un appel aux dons en faveur du centre communal d'action sociale (CCAS), une initiative aujourd'hui légale. Le maire envisage d'ailleurs de mener l'opération avec l'aide technique d'un grand établissement bancaire. Il espère en tirer des recettes supplémentaires, à l'heure où la baisse des dotations de l'Etat crée un trou de 540.000 euros dans le budget municipal. Mais les Tervillois se montreront-ils généreux après la hausse de 7% de leurs impôts locaux décidée en début d'année par leur conseil municipal ? Patrick Luxembourger n'en doute pas, mettant en avant "la confiance" des habitants en leur maire et leur esprit d'"ouverture".
Thomas Beurey / Projets publics
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